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20 avril 2009 1 20 /04 /avril /2009 06:13

 

Je l’ai reconnu tout de suite la vieille dame aux cheveux blancs née en Hongrie. La dernière fois que nous nous étions croisées remontait au mois de janvier 2004. Ce qui nous avait rapproché cette année-là ? C’était ce séjour Jacques Castermann (immense maître d’Aïkido) où, elle et moi au milieu du groupe nous avions à gérer nos problèmes de dos. Nous avions à accepter notre différence, nous avions à accepter de ne pas pouvoir tenir les postures debout aussi longtemps que les autres. Mais dans l'étrange exercice proposé par Castermann de cheminer les uns derrière les autres le temps du Boléro de Ravel, nous nous étions surprises de tenir jusqu'au bout.
La musique servant de support à tant de pubs avait pris alors pour nous une autre dimension, nous avait portée, transportée, nous avait insufflée une énergie qui nous avait prises au dépourvu.


Donc nous nous reconnaissons et nous tombons dans les bras l’une de l’autre. Elle a bien changé cependant en quelques années.

A la première soirée, la vieille dame aux bons grands yeux clairs et aux poils blancs sur le menton, bonne conteuse, me décrit la Hongrie d’avant le rideau de fer.

Le deuxième soir c’est avec beaucoup de verve qu’elle me narre sa venue en France pour étudier, sa rencontre avec l’étudiant en médecine qui allait devenir son mari et lui faire cinq enfants avant de s’en aller avec une jeunette… amie de sa fille…

A la troisième soirée elle reprend le fil de son récit devant nos tasses de tisane. Sans aucune amertume dans la voix, sans laisser transparaître aucun regret elle explique : comment aurait-elle pu lutter contre une nana de vingt ans, elle qui venait d’en avoir cinquante ? Il fallait le comprendre cet homme…

Et puis Marika parle de son père : Bela Emanuel, peintre. En 1953, l’homme avait fini par fuir la Hongrie car les communistes au pouvoir lui avaient supprimé les commandes d’état et l’avaient relégué dans le rôle d’un professeur de dessin anonyme. Arrivé en France avec une renommée internationale, ayant vendu des tableaux pour des musés de New York et de Londres, le maire de Paris, Taittinger, lui commande son portrait.

Donc, tous les jours Monsieur le maire envoie une voiture avec chauffeur chercher le peintre. Le deuxième jour, Bela Emanuel tache sa chemise mais le lendemain le peintre remet la même chemise. Et pendant toute la durée du portrait, au grand dam de sa femme et de sa fille, il s’obstine à ne porter que cette chemise.  

Le portrait fini, le peintre dit à sa femme :

-        - Bon, d’accord, donne-moi une chemise propre.

Et il la  met dans un paquet qu’il fait porter au Maire avec un mot à l’intérieur : « Monsieur Le Maire, ma femme et ma fille me disent que c’est une honte d’avoir remis la même chemise tous les jours alors que j’en possède d’autres. Pour bien vous montrer que c’est le cas, je vous en envoie une propre ! »

Taittinger rira tellement qu’il lui fera porter une caisse pleine de bouteilles de champagne.

   

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