«La poésie est pour moi la plus belle forme de la littérature, parce qu'elle est concentrée, concise - on y garde
l'essentiel...
(...) J'aime que ce soit facile d'accès... Un roman, on le lit avec les yeux, l'esprit. Dans un poème, les mots sont trop
importants pour être figés. Même si le sens nous échappe, il faut le lire à voix haute».
Jean-Louis Trintignant - Télérama N° 3275 du 20 au 26 octobre 2012
Mumm ! Un vrai plaisir de lire ça ! Le comédien dit exactement ce que je pense, ce que je souhaite de la poésie, ce
que j'espère y trouver.
Facile d'accès ? Tel était mon but en écrivant "Du quotidien à voix haute"
(Manoirante) et "En habits de charivari" (Manoirante). Donner à lire des poèmes accessibles au plus grand nombre, sans élitisme ni hermétisme. C'est
aussi ce qu'est le slam.
A propos... n'y a-t-il pas un bon bout de temps que je ne vous en ai pas livré un ? Allez, c'est parti,
un de saison...
La rentrée
Gratin de feuilles roussies dans l’allée du jardin
la rentrée se brode au point de croix.
La rentrée ? Qu’est-ce que ça fait ?
Croix de bois, croix de fer sur la page des vacances,
sur le maillot, le grand chapeau, la brasse coulée dans les vagues.
Vagues… à l’âme
dans la couverture ajoutée sur le lit.
La rentrée ? Qu’est-ce que ça fait ?
Y a belle lurette que j’ne vais plus à l’école !
Pourtant invariablement
quand septembre me frôle
une vague appréhension se mêle à la brume de saison
et embrume ma raison ; je flageole.
Potage de jours raccourcis sous le parapluie
la rentrée se tisse en fil de laine.
Laine de bois, laine de fer
dans le pull par-dessus le tee-shirt.
La rentrée ? Qu’est-ce que ça fait ?
Y a belle lurette que j’ne vais plus au lycée !
Seulement, despotiquement, Monsieur Monceau de Courrier
délaissé durant l'été m'interpelle :
"La cigale ayant chanté..."
Vagues… à l’âme
dans la pelle enchâssant les feuilles roussies
Feuilles de bois, feuilles de fer.
La rentrée ?
Bah ! Se rappeler :
la rentrée n’est jamais qu’un état passager.
Publié dans En habits de Charivari (Editions Manoirante)