Je croyais être la seule à me réciter des textes pour m'endormir... ou replonger dans le sommeil fuyant mes nuits Ce sont les lapins... et voici qu'après mon amie Nicole qui m'avoue dans un commentaire en faire autant, je viens de lire dans le dernier numéro de Télérama que le réalisateur Raoul Ruiz pratique aussi la chose !
(...) « Je ne connais pas beaucoup de langues, mais j'apprends des poèmes la nuit, pour lutter contre l'insomnie et Alzheimer par la même occasion. »
Si moi j'ai un faible pour les lapins de Daudet, Nicole préfère "Moi je" de France Léa.
MOI-JE..........
On est deux !... Moi et Je... Moi aurait laissé trainer la boulette, Moi s'en fiche... ce que Moi laisse trainer, Je va le ramasser. Moi aurait tendance à se laisser prendre par toutes les vitrines, acheter ceci, cela, " oh c'est joli... çà... et çà... et çà..." Je l'empêche parce que Je pense, Je réfléchis..." çà, çà, çà " est-ce bien nécessaire ? Moi veut tout ! avide ! insassiable!... comme un enfant !... Heureusement que Je suis là... que Je suis un père, une mère pour moi.
Malheureusement Je n'ai pas toujours été là ! Moi en a laissé trainer des boulettes, en a acheté des choses en trop dont Je peine aujourd'hui à me défaire... Mais les conjugaisons montrent bien qu'on est deux : Je Me promène, Je promène Moi... Moi irait n'importe où .. Je l'oriente, de préférence vers les jardins, vers là où c'est vert, clair, lumineux ! Moi irait voir absolument n'importe quoi, du moment que "on" dit que c'est à ne pas manquer, Moi le crois. " Elle marche pas, elle court ! " aurait dit Maman. JE cite ma maman dans tout mes spectacles... parce qu'elle avait parfois des réflexions forts pertinentes, dont Je ne voudrais priver personne d'aucun pays francophone. Merci Maman.
Une autre conjugaison montre bien qu'on est deux: Je Me calme... Je calme Moi qui s'énerve toujours pour un rien dans une file d'attente... suffit que quelqu'un fasse mine de vouloir prendre son tour, Je dois intervenir d'urgence " Calme-Toi ! "........ et des Moi hyper énervés, sans Je pour les calmer, mais à la moindre contrariété sortent le poing, le couteau, le flingue !... Je suis rentrée mécontente de Moi cette nuit : " on ne sortira plus " me suis-Je dis, ais-Je dis à Moi qui a bavassé toute la soirée. Je n'ai rien pu dire ! ! Je m' entendais Me vanter, Me plaindre, critiquer le monde : "Mais tais-Toi, mais tais-Toi donc...mais c'est n'importe quoi, arrête.." Moi n'entends pas, n'écoute pas la petite voix que Je suis, Je n'insiste pas, c'est vrai que, au bout d'un moment, dans ces cas là, ben Je s'en va... Je disparait complètement et Moi continue son cinéma............... et c'est à ce moment là que l'un ou l'une d'entre vous pourrait demander :
" Mais dites-donc, depuis le début là, vous êtes qui ? c'est votre Moi ou votre Je ? "
" Oh... c'est une excellente question à laquelle Je veux répondre...et bien depuis le début, je vous parle de Moi, de Mes ennuis, de Mes désaccords avec Moi, autant Je peux parler de Moi, autant Moi est incapable de dire qui Je suis. Moi ne sait pas qui Je suis. Moi est le visage pâle dont Je suis l'indien... et le visage pâle ignore à peu près tout de l'être dont il occupe le territoire.... Moi est le petit trou de serrure, le petit judas, à travers lequel Je perçois très très étroitement, très très obscurément le monde... seulement Je ne peux pas vivre sans Moi... ici bas, sur terre, c'est impossible.... Moi fournit les bras, les jambes, les oreilles, les yeux, la bouche... alors qu'est-ce qui... bon, alors pour en revenir et en finir avec la soirée d'hier, c'est Moi qui avait voulu y aller, Je n'y tenais absolument pas... et c'est toujours pareil, chaque fois que Je me laisse entrainer par Moi c'est la cata... On finit pas les mots, on n'a pas le temps ! Quand Je décide, c'est beaucoup mieux, Je décide après mûres réflexions... Moi non ! ! ! Moi agit par pulsions... un cheval emballé dont après tout, Je dois tenir les rennes, Je suis le cavalier... MOI n'est que mon cheval. Mais pendant des années, le cheval entrainait au diable le cavalier, le renversait, le trainait à sa suite dans la poussière...
Ce qu'on aimerait pouvoir revenir sur ses pas... ramasser toute ses boulettes...
France Léa